Imane Lallali-Benberim

Imane Lallali-Benberim

Manager pour le secteur Energie & Utilities CGI Business Consulting

Bousculé par les nouveaux usages et technologies, le marché de la mobilité est en pleine transformation. Les observateurs du secteur s’accordent à dire que cette nouvelle mobilité sera propre, partagée, connectée, à la demande et multimodale, avec une évolution de la propriété vers les services. Attardons-nous ici sur la notion de mobilité propre.

Deux catégories principales de véhicules sont concernées (sans compter les véhicules GNC et GPL). D’abord les véhicules électriques, dont le parc roulant a atteint plus de 3 millions d’unités dans le monde en 2017, et pour lequel on prévoit une part de marché de l’ordre de 50% d’ici 2050. Ensuite, les véhicules à pile à combustible hydrogène. Si cette seconde technologie est moins mature – le stock à date ne compte que 72003 unités dans le monde – elle reste néanmoins à suivre de près.   

Les véhicules électriques ont le vent en poupe

Lors du dernier Mondial de l’Automobile à Paris, de nombreux nouveaux modèles ont été dévoilés, notamment le déjà emblématique concept car e-Legend de Peugeot. Leurs constructeurs, stimulés par un marché porteur (sensibilité des consommateurs, maturité technologique, coût des batteries décroissant, signaux réglementaires positifs), emboitent le pas aux politiques et commencent à envisager l’arrêt des véhicules diesels. Toyota, Honda, Volvo ou Porsche ont ainsi déclaré arrêter la production de véhicules diesels entre 2018 et 2022. BMW, Mercedes Benz et Volkswagen anticipent 20 à 25% de part de ventes de véhicules électriques d’ici 2025.

Le développement des véhicules électriques s’accompagne de nouveaux enjeux pour les acteurs de la chaîne de valeur de la mobilité, notamment les constructeurs automobiles, les acteurs de l’électricité ou les pétroliers.

Pour les constructeurs automobiles, transformer une menace en opportunité

Le développement des constructeurs alternatifs - notamment chinois -, démontre que la barrière à l’entrée du secteur automobile est de moins en moins élevée. Il suffit aujourd’hui de disposer des capitaux nécessaires pour sous-traiter le design et la production de la carrosserie, du châssis et autres électroniques embarquées. Le véritable cœur de métier des constructeurs réside dans l’ingénierie des moteurs. Avec l’avènement des moteurs électriques, cette ultime barrière technologique est levée et le métier de constructeur automobile est en danger. Se prémunir de ce risque consiste alors à s’en saisir pleinement pour le transformer en opportunité. Citons l’exemple de Renault qui a su anticiper les demandes du marché et se positionne en tant que fournisseur de services et développeur de partenariats. Outre la multiplication des modèles, un des enjeux majeurs pour les constructeurs réside dans leur capacité à développer des services autour de la mobilité. Le développement de partenariats avec startup, GAFA et énergéticiens, sera aussi un élément clé dans la réussite de ces nouveaux défis.

Un nouveau levier de croissance pour les énergéticiens, nécessitant une capacité d’accélération

Avec le basculement du pétrole à l’électricité et l’hydrogène, il est assez naturel que des acteurs tels qu’EDF, Engie ou Enel cherchent à développer une offre pour les véhicules, allant des bornes de recharge aux services de mobilité. Le développement de la mobilité électrique est directement lié à l’atteinte d’un volume critique de bornes de recharge. En France, seulement 0,173 borne de recharge publique par véhicule électrique, loin derrière les Pays-Bas qui comptent un ratio de 0,253. Les offres d’installation et de maintenance de bornes se multiplient, avec en tête EDF. L’énergéticien détient aujourd’hui 5 000 bornes de recharge publiques à travers sa filiale Izivia, et souhaite multiplier ce nombre par 15. Via son autre filiale Sowee, EDF propose conseil, installation et maintenance de bornes de recharge à domicile. Engie et Enel, quant à eux, abordent le marché au travers d’acquisitions, de partenariats et d’offres d’électricité moins chères. Engie détient une longueur d’avance sur l’hydrogène et Enel se positionne sur du "vehicule to Grid". Si les acteurs des Utilities se disputent déjà ce marché, une accélération est indispensable afin de garantir un positionnement de leader.