La gestion efficace des ressources énergétiques distribuées, en croissance dans le marché, est au cœur de la réussite de la transition énergétique et de la décarbonation. Dans cet épisode de notre balado Parlons transition énergétique, les experts de CGI Matt Marrow et Vincent Dufresne discutent de l’importance d’être préparé à l’imminente adoption des ressources énergétiques distribuées et de l’électrification. Ils abordent également le rôle qu’ont les systèmes de conduite des ressources énergétiques distribuées (acronyme anglais usuel « DERMS ») de calibre d'enterprise de services publics dans l’élaboration d’un réseau futur stable, résilient et décarboné.

L’adoption généralisée de nouvelles énergies renouvelables variables telles que les champs solaires photovoltaïques et les parcs éoliens nécessite une transformation des modèles opérationnels des systèmes de distribution traditionnels. Les ressources énergétiques distribuées incluent les panneaux photovoltaïques intégrés aux immeubles, les génératrices de secours, les appareils de stockage de l’énergie (souvent situés derrière le compteur), ainsi que les ressources provenant des programmes de gestion de la demande en pointe. « Toutes ces ressources énergétiques distribuées répondent aux défis causés par à la percée des énergies renouvelables variables, qui sont devenues très abordables », note M. Dufresne. 

Toutefois, avec des millions de ressources énergétiques distribuées branchés au réseau, obtenir une visibilité et un contrôle de l’ensemble est une tâche d’autant plus complexe. M. Dufresne affirme que les DERMS peuvent jouer un rôle essentiel pour la surveillance, le contrôle et l’exploitation de tous les types de ressources énergétiques distribuées. « En fin de compte, un DERMS permet aux services publics d’électricité de contrôler toutes ces ressources et de les valoriser au bénéfice de l’ensemble de la population, en plus de contribuer à la transition énergétique. »

Adopter un système de gestion des ressources énergétiques distribuées pour optimiser le réseau et limiter les coûts

La prolifération inévitable de ressources énergétiques distribuées et l’augmentation de l’électrification ont augmenté l’importance d’une préparation adéquate. « Mettre la main sur un DERMS n’est qu’un des éléments auxquels les fournisseurs de services publics devront réfléchir pour se préparer à cette transition énergétique », dit M. Dufresne.

Avec l’avènement des cibles de plus en plus importantes de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), les de services publics doivent se concentrer à décarboner le réseau actuel et celui du futur. D’un côté, décarboner le réseau, indique M. Dufresne, exige le remplacement des infrastructures actuelles responsables des GES par des ressources énergétiques propres. De l’autre côté, le réseau futur devra être capable de soutenir une demande énergétique beaucoup plus importante au fur et à mesure que l’électrification se généralisera. Celle-ci proviendra du secteur des transports en premier, mais éventuellement ce seront les systèmes de chauffage de l’eau des bâtiments et les procédés industriels qui emboîteront le pas, bien qu’à un rythme plus lent. « Afin d’augmenter la capacité du réseau et servir plus de demande d’électricité, nous allons devoir mettre à niveau les équipements, les câbles, les lignes de transport d’électricité et les postes de transformation », affirme M. Dufresne. 

Toutefois, les mises à niveaux de l’infrastructure matérielle peuvent s’avérer onéreuses, demandant des investissements massifs qui pourraient exercer une pression à la hausse sur les prix de l’électricité. « Les DERMS misent sur l’optimisation de la capacité du réseau par-rapport au besoin, puisque l’infrastructure logicielle est moins chère que l’infrastructure matérielle, afin de réduire notre facture d’électricité pour l’avenir et tandis que l’économie se décarbone », explique-t-il. 

Produire une analyse de coût-bénéfices « béton » des DERMS

Les services publics n’auront d’autre choix que de présenter de rigoureuses analyses coûts-bénéfices aux commissions de services publics qui les passeront sous la loupe avant d’autoriser les investissements massifs nécessaires à la mise en œuvre de ces solutions. « Les commissions de services publics s’inquiètent d’investir dans la mauvaise technologie et de se retrouver avec des installations abandonnées », dit M. Marrow. 

Il affirme que jusqu’à présent, les services publics ont procédé à des tests à petite échelle pour évaluer les capacités des DERMS, ou du moins, de certaines composantes de ces systèmes. Notamment, l’un des défis auxquels font face les services publics concerne les fonctionnalités nécessaires à un DERMS devant soutenir l’ensemble des demandes d’une entreprise. « Nous allons commencer à nous entendre sur les indispensables à inclure. Cependant, je crois que cela amorcera la première vague de mise en œuvre des DERMS de calibre de services publics », affirme M. Marrow.

Mais encore, davantage de travail doit être accompli pour y parvenir. « Si nous avions une vue plus dégagée, plus complète, du réseau et des répercussions potentielles que ces perturbateurs futurs auraient sur celui-ci, peut-être serions-nous en mesure de modéliser plus précisément pourquoi nous avons besoin des DERMS afin d’éviter les coûts de nouveaux équipements », explique M. Marrow. Ce type d’information demande des prévisions et des analyses granulaires, qui, à leur tour, exigent une vision granulaire du réseau, et ce, jusqu’à ses extrémités, donc jusqu’aux compteurs. 

Les données et la modernisation au service d’un déploiement réussi

Pour ce qui en est du scénario actuel, acquérir ces renseignements exploitables n’est pas une tâche facile. Bien que les services publics génèrent beaucoup de données de leurs systèmes centraux, notamment de leurs systèmes de conduite du réseau de distribution, de gestion des pannes, de gestion des actifs d’entreprise, et les systèmes d’informations géographiques, ces données se trouvent généralement sur différentes plateformes et pour des applications différentes. « Ce dont nous avons réellement besoin est d’une vue globale de ces données, provenant de tous ces systèmes, qui nous permettra de concevoir cet aperçu unique du réseau. À son tour, cette vue unique nous aidera à établir nos analyses coûts-bénéfices », indique M. Marrow.

M. Dufresne partage le même avis et ajoute que les services publics pourraient être contraints de communiquer des informations au public pour permettre aux fournisseurs tiers de concevoir et proposer des solutions pour certaines zones du réseau. La disponibilité, la gestion et la gouvernance des données seront essentielles aux préparatifs du déploiement des DERMS d’ici deux ou cinq ans. 

L’accessibilité et l’interopérabilité des données sont d’autres aspects indispensables qui nécessiteront la modernisation des systèmes centraux existants. « Tous ces systèmes génèrent des données qu’il faudra prendre en compte lorsque viendra le moment de mettre en œuvre des DERMS. Donc, il est primordial de tirer le plus de données de ces systèmes existants. Ainsi, tous les efforts de modernisation qui sont accomplis en amont s’avéreront bénéfiques quand viendra le temps de mettre en œuvre une solution », affirme M. Marrow.  Lors d’une récente séance de questions, M. Dufresne examine en détail la modernisation du réseau, ce que cela implique, ses moteurs et ses défis.

Surmonter les défis d’un déploiement

Tirer profit des avantages d’un DERMS nécessite le suivi de toutes les ressources énergétiques distribuées : des thermostats et autres appareils intelligents et aux bornes de recharge pour véhicules électriques. Pour ce faire, l’une des conditions est que tous les appareils soient dotés de protocoles de communication afin de pouvoir les contrôler à distance, communiquer avec eux, les rendre interopérables les uns avec les autres et avec le DERMS. Actuellement, ce n’est pas le cas et cela pose un défi au déploiement des DERMS.

Une autre de ces conditions concerne l’adhésion et la rétention des consommateurs aux programmes de gestion de la demande en pointe. « Nous ne pourrons pas contrôler les appareils à distance si les consommateurs ne nous y autorisent pas », explique M. Dufresne. Les services publics doivent interagir avec les clients, leur offrir des expériences supérieures et gagner leur confiance pour qu’ils adhèrent aux programmes. « Les programmes existants de gestion de la demande en puissance ont eu une percée intéressante sur le marché, mais nous devons étendre leur portée pour surmonter les différents défis liés à la génération variable et à l’électrification auxquelles nous pouvons nous attendre », ajoute-t-il.

Les DERMS peuvent aider à gérer intelligemment et en toute sécurité diverses ressources énergétiques distribuées afin de transformer les défis en avantages opérationnels et financiers. Pour aller de l’avant : « demeurez informé de la direction que prennent les DERMS et alignez-vous à une feuille de route ainsi qu’au partenaire qui correspond le mieux à cette feuille de route », conseille M. Dufresne.

Écoutez d’autres balados de la série